Anastasia témoigne

Le plus beau cadeau

 

A la maison, l’atmosphère est calme. On est fin février 2014, un soir comme un autre. Il est environ 22H30 quand on frappe à la porte, C’est notre médecin de famille, une feuille à la main. Il veut parler à notre mère, il lui dit « Il faut que vous alliez aux urgences, je pense qu’il y a une erreur, cela arrive, mais il faut vérifier ». Notre mère lui demande pourquoi elle doit aller à l’hôpital « c’est parce que vos plaquettes sont anormalement basses et que vous risquez de faire une hémorragie à tout moment ».
Nous sommes partis en urgence à l’hôpital où notre mère a fait plein d’examens, une attente infernale… Enfin le médecin est entré dans la chambre pour nous expliquer que ce n’est pas une erreur et qu’il faut emmener notre mère à Nantes d’urgence… « Elle doit être transfusée au plus vite car nous pensons qu’elle a une leucémie ». Ma mère entend tout, elle ouvre sa bouche d’étonnement, on se regarde et les portes du véhicule qui doit la conduire à Nantes se referment. Je reste là sur le parking, je ne comprends pas, juste les larmes qui montent de peur, je m’effondre….

 

Je n’y crois pas

 

Le lendemain ? mon beau-père et moi allons à Angers unité « maladies du sang » unité stérile. Un médecin nous reçoit et nous explique que ma mère a une leucémie aiguë lymphoblastique…c’est impossible, un cancer, un cancer du sang, mon dieu… mais c’est une réalité qui se transforme en cauchemar… Ma mère ne mérite pas ça, pas elle… Qu’est-ce que je vais dire à ma petite sœur ? Et à ma grand-mère ? … je suis tétanisée.
Puis vient le premier rituel : comment mettre les blouses et comment entrer dans l’unité stérile, tout un protocole suivi machinalement. Je vois enfin ma mère, si pâle, des bleus sur les bras … on pleure on n’y croit toujours pas … mais vient le moment où on doit l’annoncer à ma petite sœur et à ma grand-mère, on préfère que ce soit ma mère qui le fasse, à l’hôpital. Il y a des larmes, encore des larmes, ça fait si peur, si mal…
On nous explique qu’il faut vite faire les chimiothérapies d’attaque et c’est parti. Nausées, vomissements, fièvre, douleurs, des tas d’effets indésirables qui sont un supplice, la perte des cheveux, un moment douloureux, maman avait de si beaux cheveux…, aplasie durant un mois. Ne pas pouvoir embrasser notre maman était si difficile…, sourire et pleurer à travers des masques pour qu’elle n’attrape rien. Arrive le moment de choisir une perruque, maman prend 15 kilos à cause du traitement. J’ai arrêté de travailler pour m’occuper de ma mère à plein temps et ma sœur a mis ses études en attente.

Les résultats sont très encourageants, elle répond bien au traitement enfin un espoir. Durant deux ans et demi ; la rémission. Le docteur dit qu’en août 2016, on pourra parler de rémission totale. Les sourires reviennent. Le combat si long et si difficile aura servi à nous unir encore plus, notre lumière, notre maman, si sacrée pour nous, déjà si proches avant la maladie, maintenant on ne fait plus qu’un, on s’aime chaque jour encore plus.
Juillet 2016 je décide de prendre enfin un peu de vacances, à Nice pour un mois, Le 14 juillet je regarde le feu d’artifice sur la plage et rêve de reprendre mes activités laissées à l’annonce de la maladie de ma mère quand j’entends des gens hurler et courir. Je me retrouve prise au milieu de l’attentat sur la Promenade des Anglais …

Après une nuit de peur et de tristesse, je veux rentrer chez moi. Fatiguée je m’endors, le téléphone sonne, c’est ma mère « Je fais une rechute, la maladie est revenue ». La nouvelle tombe comme un couperet. Je me précipite sur le premier billet d’avion et rentre : Retour en chambre stérile je ne veux pas y croire… On refait tous les bilans, on entame des thérapies « nouvelles » mais cela n’est pas suffisant, il faut faire une greffe de moelle osseuse. Ma mère est fille unique, on ne trouve pas de donneur compatible c’est la panique… Le médecin propose de faire une greffe « Haplo-identique » c’est-à-dire compatible à 50 %, on nous teste ma sœur et moi et on me choisit en tant que donneur. Il faut faire vite. Je passe toutes les visites de contrôle. S’en suit une semaine de piqûres de facteur de croissance pour faire passer les cellules de ma moelle osseuse dans mon sang. Le 8 février 2017, je suis branchée à une machine qui les prélève. Le 9 février, ma mère reçoit cette poche magique qui doit lui sauver la vie.

 

Un acte très fort

 

Donner ma moelle a été un acte très fort et m’a profondément touchée : donner à celle qui m’a donné la vie est le plus beau cadeau que je puisse lui faire. Ma sœur a peint une magnifique toile qui représente la greffe de moelle osseuse. L’après-greffe est un moment très difficile à passer, il faut beaucoup de soutien, surtout les 100 premiers jours. Il y a eu des complications, mais pas de rejet. Notre espoir a grandi car chaque jour qui passe est une victoire, nous sommes plus fortes et soudées que jamais. Notre grand rêve est de pouvoir acheter un jour à notre mère une maison dont elle a toujours rêvé et de la voir vivre et vieillir à nos côtés. Cette greffe nous donne cet Espoir.

Nous remercions Mme Simone Cravignac directrice du « Logis Ozanam » à Angers, pour sa générosité et son accueil ainsi que l’association « Leucémie Espoir ».

 

Anastasia